Le saviez-vous? Nos civilisations ne seraient certainement pas ce qu’elles sont aujourd’hui sans la domestication animale… pour le meilleur et le pire! Mais que cache réellement le mot « domestication »? Quelles subtilités? Quelles conséquences et quel possible avenir pour nos sociétés et les animaux concernés, aussi bien du côté sauvage comme domestique de la barrière humaine?
Valérie Chansigaud, historienne des sciences et de l’environnement réussit le tour de force de rendre accessible au grand public ce processus complexe qu’est la domestication animale. Avec elle, on explore les différentes formes de domestication selon les espèces et selon les besoins humains d’abord au travers du chien, premier animal domestiqué de longue date, aux plus récentes, poissons et insectes, en passant par des statuts plus incertains d’animaux dans des zones « grises » (chat, abeille, éléphant…).
L’auteure fait aussi tomber nombre d’idées reçues sur les origines de la domestication et ses conséquences sur notre alimentation. Ainsi vous apprendrez que c’est souvent pour pouvoir assouvir la demande en animaux sacrificiels (pour divers rites religieux) que la domestication s’est développée, en dehors de celle du chien qui est devenue le premier auxiliaire aux activités des humains (chasse). Elle revient également sur l’idée que l’essort de l’agriculture et la domestication animale ont contre toute attente fortement réduit la consommation de viande (voir extrait ci-dessus), une végétalisation qui, combinée à la sédentarisation et à une consommation d’animaux plus gras a eu des répercussions physiologiques sur l’être humain, ce qui vient alimenter les théories d’auto-domestication humaine.
Vous apprendrez entre autres aussi qu’élevage et domestication ne vont pas forcément de pair: certaines espèces sont impossibles à domestiquer, ou leur sélection n’est pas jugée nécessaire (cas du boeuf musqué), ce qui n’empêche pas d’envisager des élevages de type industriels comme celui des insectes destinés à la consommation humaine, entre autres (il existe déjà une filière d’alimentation à destination animale autre qu’humaine). Même sans sélection cependant, la captivité ainsi que les conditions de vie particulières peuvent résulter néanmoins dans des signes de domestication plus ou moins prononcée (voir plus haut « syndrôme de domestication » selon Darwin).
Tout ça et bien plus, vous le découvrirez dans cet ouvrage, parfois long et répétitif mais qui offre un bon tour d’horizon et n’a pas manqué de soulever chez moi de nombreuses autres questions d’ordre éthique ou sur la conservation de la biodiversité.
Avez-vous lu cet ouvrage ou un autre en rapport avec la domestication animale? N’hésitez pas à commenter plus bas ⬇️
BONUS (RESSOURCES AVEC LIENS)
Pour aller plus loin dans la réflexion sur la domestication, voici quelques articles et un extrait.
LE CHAT DOMESTIQUE
Are Cats Domesticated? by Ferris Jabr, Ocotber 23, 2015, The New Yorker
Ask Smithsonian: Are Cats Domesticated? by Alicia Ault, April 30 2015, Smithsonianmag.com
L’AUTO-DOMESTICATION
Première preuve génétique de l’auto-domestication de l’espèce humaine, Caroline Ando, 5 décembre 2019, Leblob.fr
Auto-domestication humaine et Pacification – Source : http://neuromonaco.com/lettres/lettre79.htm
Les premiers humains ont dû se féminiser pour dominer le monde, Mark Maslin, 19 octobre 2015, The Conversation
Le syndrome Tarzan. L’émancipation et la domestication de l’être humain, de Larry Portis, 1999, L’homme et la société, article gratuit chez Persée.
SYNDROME DE DOMESTICATION
The animals changed by proximity to humans, By Jasmin Fox-Skelly, 9th August 2021, BBC.com
Syndrome de domestication : ces animaux qui ont changé physiquement au contact de l’humain, par Chloé Rosier, 9 juillet 2022, RTBF.be
ÉLEVAGE DES INSECTES
Une usine spécialisée dans l’élevage et la transformation d’insectes pour l’alimentation ouvre dans les Ardennes en 2022, Océane Michel, Publié le 21/07/2022 à 12h53, Mis à jour le 21/07/2022 à 17h07, France Info
ALLER PLUS LOIN DANS LA NOTION DE DOMESTICATION
Charles Stépanoff : Coexistences intermittentes, Socialter Hors série n°9 « Renouer avec le vivant », décembre 2019 – Février 2021
« Ce n’est pas seulement la cartographie des domaines du sauvage et du domestique qui s’avère différente de la nôtre, mais la nature même de la frontière : hermétique pour nous, ouverte aux échanges pour eux. Que faire face à cette incohérence entre deux taxinomies qui renvoient clairement à des conceptions différentes de ce qu’est un animal domestique ? Doit-on donner la prééminence à la définition occidentale et lui présumer une valeur universelle ? Après tout, cette définition est à l’évidence un reflet de nos pratiques modernes d’élevage marquées par l’industrialisation et la sélection dirigée. Pourquoi faudrait-il s’attendre à ce qu’elle soit pertinente chez des collectifs autochtones qui pratiquent des méthodes totalement différentes ? Soit nous continuons de dire que les animaux de peuples comme les Tozhu sont semi-sauvages ou proto-domestiqués, soit nous prenons le risque d’interroger la notion même de domestication pour tenter de la rendre compatible avec d’autres formes de rapport à l’animal que celles auxquelles l’élevage industriel nous a accoutumés. »
Super article ! Et j’aime beaucoup la disposition des images pour reprendre le carrousel d’Instagram. Je crois que je vais m’en inspirer pour mon blog 😉 !
Sinon, sur la domestication du chat, je conseille cette émission de La Méthode scientifique : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-methode-scientifique/les-chats-et-leurs-humains-de-compagnie-7737024
C’est super intéressant. En fait, ils disent que le chat est encore en cours de domestication (et quand je vois les chats de mes amis, je confirme). Et que l’humain n’a pas eu besoin de le domestiquer auparavant car le chat faisait le boulot tout seul (chasser les rats et souris) et sa taille n’était pas problématique.
Hihi, je te plussoie Crevette Diplomate ! Eva-Maria Geigl me fait trop rire avec son credo « Le chat a été parfait dès le début donc inutile de le faire évoluer ! » 😀
J’adore potasser des bouquins de domestication, même sur « l’autodomestication » de l’être humain, c’est passionnant …